Homélie du 3ème dimanche du Carême
Abbé Jean Compazieu | 27 février 2021Dieu libérateur
Textes bibliques : Lire
En ce temps du Carême, nous continuons notre montée vers la grande fête de Pâques. Les textes bibliques de ce jour nous révèlent un Dieu libérateur qui se fait proche de nous. Il nous rejoint dans la situation qui est la nôtre pour nous relever et aller de l’avant sur le chemin qu’il nous montre.
La première lecture est tirée du livre de l’Exode. Ce livre nous raconte comment Dieu a fait appel à Moïse pour libérer son peuple de l’esclavage d’Égypte. Aujourd’hui, il les invite à faire un pas de plus. Il leur donne sa loi pour leur apprendre à bien vivre les uns avec les autres. Dieu les aime tous de la même manière ; il veut le salut de tous. Les commandements qu’il leur laisse commencent par des interdits : “Tu n’auras pas… Tu ne feras pas…” Ces paroles leur disent ce qu’il faut éviter pour ne pas retomber dans l’esclavage.
Il s’agit de renoncer aux idoles, ces faux dieux qui revendiquent d’être l’absolu de l’homme. Ces faux dieux sont toujours d’actualité : pensons à la course à l’argent et aux richesses matérielles : tout cela ne fait que nous enfermer dans notre égoïsme. Nous devons également éviter toutes les paroles méchantes et négatives qui ne font qu’ajouter un peu plus de poison à la société dans laquelle nous vivons. Les paroles que le Seigneur nous laisse aujourd’hui sont une étape importante dans la vie de son peuple. Elles sont aussi des points de repère pour nous.
Le psaume se présente comme une réponse amoureuse au don de la loi. Il nous invite à rendre grâce à Dieu qui libère son peuple. Dieu lui enseigne comment il faut vivre pour rester dans l’alliance et accueillir la bénédiction. Plus tard, l’apôtre Pierre reconnaîtra que les paroles de Jésus sont celles de la Vie éternelle. Tout au long de ce Carême, nous sommes invités à les lire et à les relire. Elles contiennent des graines de l’amour qui est en Dieu.
Dans la seconde lecture, l’apôtre Paul nous invite à nous tourner vers la croix du Christ. Elle nous rappelle son amour inimaginable : “Nous proclamons un Messie crucifié”. Tant pis pour ceux qui s’efforcent de rendre raisonnable l’Évangile de la croix. Si nous voulons comprendre quelque chose à l’amour de Dieu, c’est vers la croix que nous devons regarder. Le vrai Dieu se révèle là où les hommes ne voient que la honte et l’échec. Le signe de la croix se présente comme la seule attestation d’un Dieu dont le nom est “miséricorde”.
L’Évangile nous montre la réponse que Dieu attend de nous et surtout ce qu’il ne veut pas. Cela se passe dans la cour du Temple de Jérusalem. Un “centre commercial” à but liturgique y avait été installé. On y rencontrait des vendeurs d’animaux et de produits pour les sacrifices ; les changeurs de monnaie y faisaient également leurs affaires. Chacun y trouvait son compte. Mais le Christ n’est pas d’accord. À la manière des prophètes, il pose un acte fort pour contester ce qui lui paraît indigne de ce haut lieu de prière.
C’est ainsi que Jésus a voulu purifier le culte qui se pratiquait dans le temple. Aujourd’hui, il nous rejoint pour purifier notre prière. L’Évangile nous apprend que Jésus ressuscité est désormais le seul chemin vers Dieu, le seul temple où l’on peut rencontrer Dieu. Ce nouveau Temple est universel. Personne n’est propriétaire de Jésus ni de son message, ni de son action dans le monde. Son œuvre de salut est pour tous. C’est pour nous et pour la multitude qu’il a livré son Corps et versé son sang.
Il nous faut aller plus loin dans la compréhension de cet Évangile : dans sa lettre aux corinthiens, saint Paul écrit : “vous êtes le temple du Christ, vous êtes le temple de Dieu”. Il nous faut donc chasser de ce temple tout ce qui rend impur. Les vendeurs que Jésus dénonce, c’est chacun de nous quand nous sommes encombrés par des préoccupations égoïstes ou mesquines. Ce n’est qu’en faisant le ménage en nous que nous pourrons retrouver Dieu. C’est absolument nécessaire si nous voulons accueillir dignement le Christ ressuscité.
Chaque dimanche, l’Évangile devient ce “fouet à cordes” que Jésus utilise pour changer notre cœur et notre vie. Le Seigneur est là pour chasser de nos cœurs l’attachement à nous-mêmes. Il renverse la ténacité que nous avons dans la poursuite de nos affaires à n’importe quel prix. Pour lui, il n’y a pas de bonheur contre les autres ni sans les autres. Et s’il n’y a pas de place pour Dieu dans notre vie, il n’y en aura pas pour nos frères non plus. L’Évangile nous est donné pour qu’il change nos cœurs. Ayons le courage de faire le “ménage de Pâques” pour accueillir dignement le Christ ressuscité.
En ce jour, nous nous tournons vers le Seigneur pour lui confier notre désir de conversion. Qu’il nous fasse revenir vers lui. Et pour que chaque jour nous soit profitable, qu’il ouvre nos esprits à l’intelligence de sa loi. Amen
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Sources : Feu Nouveau, les Cahiers de Prions en Église, Fiches dominicales, Dossiers personnels…
« Dans le Temple, Jésus trouva installés les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs. Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple, ainsi que les brebis et les bœufs. Il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs » (Jn 2:14-15) On oserait à peine imaginer la scène !… Quelle violence chez ce Jésus dont on a si souvent évoqué la bonté et la douceur. Le motif devrait être assez important pour justifier cette colère. En effet, à la place d’un lieu de prière et d’adoration, Jésus trouve le tohu-bohu des animaux et l’agitation bruyante d’un marché. « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. » (Jn 2:16)
En les chassant, Jésus s’en prend non seulement aux commerçants irrespectueux mais surtout à une pratique fondée sur la forme extérieure du culte. Déjà, les Prophètes d’Israël avaient contesté les sacrifices rituelles des animaux pour acheter la bienveillance de Dieu. Ils dénonçaient avec vigueur, l’incohérence entre ce qu’on célébrait dans les temples et ce qu’on pratiquait dans la vie quotidienne. Le prophète Isaïe avait prévenu le peuple Israël : « Les holocaustes de béliers, la graisse des veaux, j’en suis rassasié. Le sang des taureaux, des agneaux et des boucs, je n’en veux plus. […] Ôtez de ma vue vos actions mauvaises, cessez de faire le mal. Apprenez à faire le bien : recherchez la justice, mettez au pas l’oppresseur, faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la veuve. » (Isaïe 1:11-17) Le prophète Amos avertissait : « Quand vous me présentez des holocaustes et des offrandes, je ne les accueille pas ; vos sacrifices de bêtes grasses, je ne les regarde même pas. Éloignez de moi le tapage de vos cantiques ; que je n’entende pas la musique de vos harpes. Mais que le droit jaillisse comme une source ; la justice, comme un torrent qui ne tarit jamais ! » (Amos 5:22-24)
À la place des offrandes rituelles, Jésus appelle ses compatriotes, et aussi nous-mêmes, à rechercher une vraie présence de Dieu et à se mettre en intimité avec Lui. Porter Dieu dans son cœur et se mettre en harmonie avec son prochain ! « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. […] Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là. » (Mc 12:30-31) C’est cette attitude qui plaît à Dieu. Avec la ‘Bonne Nouvelle’, Jésus instaure une ère nouvelle de la foi. Il préconise la sincérité de l’amour et la vérité du cœur plutôt que le côté externe du sacrifice rituel. C’est ce qu’Il a clairement signalé à la samaritaine au bord du puits de Jacob : « L’heure vient où vous n’irez plus ni sur cette montagne ni à Jérusalem pour adorer le Père. […] Mais l’heure vient, et c’est maintenant, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité : tels sont les adorateurs que recherche le Père. Dieu est esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer. » (Jn 4:21-24)
Au fond, c’est toute la question de nos rites et de nos pratiques qui est au cœur de cet Évangile. La colère de Jésus au Temple vient remettre en cause nos pratiques religieuses. Bien sûr, nous ne pouvons pas nier l’importance du cérémonial comme geste religieux, mais le risque de déviance est grand lorsque l’aspect extérieur emporte sur la piété. Dans un tel contexte, Dieu n’aura plus beaucoup de place dans l’âme. Jésus nous ramène vers l’essentiel : Notre attachement à Dieu doit venir du fond du cœur. Le cérémonial a pour mission d’élever notre âme mais le sacré doit toujours occuper une place fondamentale dans nos pratiques religieuses. Ainsi, la célébration eucharistique n’est pas une messe-concert ni une messe-rencontre où le culte n’est qu’un support à un rassemblement ! C’est cette banalisation qui nous fait perdre toute l’intensité dans la vie spirituelle. Tradition et répétition peuvent nous conduire à de pratiques pieuses qui masquent la profondeur de l’âme. L’homme, dans sa relation à Dieu, doit trouver un juste équilibre entre sa foi profonde et le culte rendu à Dieu. Un excès dans l’un ou l’autre sens, et c’est la relation à Dieu qui peut être faussée.
Le temps de Carême nous invite à approfondir nos pratiques religieuses, à les rendre plus authentiques. C’est notre relation personnelle avec Dieu qui prime sur tout le reste. Que nos rites et nos célébrations, humbles et sobres, nous fassent redécouvrir, à travers les mots et au-delà des gestes, la source profonde de l’intimité avec Dieu.
Nguyễn Thế Cường Jacques
merci de tout coeur pour vos commentaires que j:attends chaque semaine avec impatience; que notre carême soit fructueux;
Obrigado pelo comentario. Deus o abençoe
Traduction : Merci pour le commentaire. que Dieu te bénisse